Discours sur le Traité Transatlantique de libre-échange

Mesdames, Messieurs, Bonjour à tous.  Je suis ravie de me trouver parmi vous.  Permettez-moi, avant tout, de remercier de leur présence:

Mme Caroline Ryan, Directeur Général, AmCham Paris ; ses collègues de AmCham Allemagne ; M. Patrick Dancourt, Président, AmCham Alsace-Lorraine ; et M. Gerard Pfirsch, Président de la Commission Export de la Chambre de Commerce et Industrie d’Alsace.

Chers Amis,

Maintenant, plus que jamais, nous devons faire front commun.  Des défis nous attendent aux quatre coins du monde.  Et les forces de la mondialisation nous amènent à réagir à la situation économique de nos partenaires tout autant qu’à déterminer notre propre voie à suivre.

Les Etats-Unis et l’Union européenne entretiennent les liens les plus solides au monde, et cela n’est pas le fruit du hasard.  C’est la conséquence d’intérêts et de valeurs partagés ainsi que d’une longue pratique de travail en commun pour renforcer notre coopération.

Nous avons en commun non seulement une même vision du monde, mais également une prospérité économique partagée et la foi en un meilleur avenir pour nos citoyens.  Nous devons continuer en ce sens, particulièrement dans le contexte géopolitique qui est le nôtre aujourd’hui.

Le volume des échanges et des investissements entre les Etats-Unis et l’Europe est si impressionnant qu’il est facile de laisser défiler les chiffres sans en percevoir les conséquences vertigineuses.

Nous formons le plus grand partenariat au monde, avec mille milliards de dollars en flux commerciaux chaque année et quatre mille milliards en investissements, qui participent à la création de 13 millions d’emplois des deux côtés de l’Atlantique.  A eux deux, les Etats-Unis et l’Europe représentent un tiers du PIB mondial.  Nos échanges bilatéraux ont doublé depuis l’an 2000.

Les Etats-Unis sont le principal pays de provenance et de destination des investissements directs européens et il en va de même pour l’Union européenne.  Les Etats-Unis ont investi 313 milliards d’Euros dans l’Union européenne en 2013, d’après Eurostat, ce qui en fait de loin le plus important investisseur étranger.  L’Union européenne est de longue date le premier investisseur aux Etats-Unis.  La croissance ainsi générée est le garant de nos efforts communs en faveur de la sécurité pour nous-mêmes et partout où elle est mise en danger.  Notre partenariat est ancré dans nos valeurs communes que sont la liberté, la démocratie et le respect du droit, et dans notre avenir économique commun.

En expliquant notre approcheaujourd’hui, j’aimerais répondre à troisquestions :

  1. Pourquoi le T-TIP ?
  2. Quelle sont les bénéfices  aux PME et TPE ? et
  3. Comment peut-on mieux coordonner nos réglementations en maintenant de fortes protections sociales, sanitaires, et environnementales ?

Sur la première question, vous seriez donc en droit de demander pourquoi envisager un Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement si nos liens sont si étroits et significatifs?    La genèse de ce partenariat, que nous nommons T-TIP et que vous appelez PTCI, remonte à la crise économique et financière de 2008.  Et même si les Etats-Unis et l’Union européenne entretiennent des relations économiques étroites et intégrées, nous sommes convaincus de part et d’autre que nous pouvons mieux faire.  En 2012, nous avons donc ensemble créé un groupe de travail afin d’approfondir notre coopération économique.

En fin d’année 2012, le groupe de travail de haut niveau sur l’emploi et la croissance recommanda un accord de commerce et d’investissement.  Les Etats membres de l’Union européenne ont donné leur accord à la Commission pour négocier en leur nom, et en juin 2013, nos chefs d’états ont annoncé leur intention de commencer les négociations.  Il s’agit certes d’une initiative ambitieuse, notamment axée sur l’élimination des obstacles non-tarifaires.  Nous savons d’expérience que ces accords ont eu pour effet de stimuler les exportations et de générer de nouveaux emplois bien rémunérés et des bénéfices pour le consommateur.

Nous sommes maintenant en pleines négociations, avec le 7ème round des discussions qui vient de se terminer, pour parvenir à un partenariat qui est une occasion qui ne se présente qu’une fois par génération.  D’ailleurs, ce Partenariat est bien plus qu’un simple accord commercial.

Ce Partenariat intervient comme une suite naturelle dans l’évolution de notre relation sur la base de nos valeurs partagées.  Ce n’est pas une révolution mais un renforcement de nos liens, au-delà de ce que nous avons déjà créé ensemble.  Les Etats-Unis se sont engagés dans la réussite des négociations en cours pour des raisons à la fois économiques et stratégiques.  Ainsi que le Président Obama l’a indiqué cette année, l’aboutissement de cet accord est «indispensable à la création d’emplois et à la relance des exportations à la fois aux Etats-Unis et en Europe. »

Ce nouveau partenariat se construit sur un demi-siècle de collaboration et apportera des avantages économiques et stratégiques des deux côtés de l’Atlantique.   Sur le front économique, les Etats-Unis ont connu une croissance de 4,6% au cours du premier semestre.  Depuis les profondeurs de la récession, notre taux de chômage a chuté  de 10% à 5,9%, et nous avons créé près de deux cent mille emplois par mois en moyenne.

Parallèlement, la croissance des autres grandes économies était lente ou stagnante.  Un nouveau partenariat ambitieux et global pourrait permettre de favoriser les réformes nécessaires pour relancer la croissance mondiale.  Un certain nombre d’estimations circulent sur les mérites, tant pour les Etats-Unis que pour l’Europe, du PTCI.  Malgré quelques variations ici et là, elles aboutissent toutes au même constat: ce partenariat va stimuler l’emploi, chez vous, en Europe, comme chez nous.

Puisque je m’adresse à un auditoire français, examinons plus précisément les conséquences du PTCI  ici, en France.  Les Etats-Unis sont le premier acheteur de biens français après l’Union européenne.  Depuis 1992, la France enregistre un excédent commercial avec les Etats-Unis qui existent jusqu’àmaintenant.

Le Partenariat va approfondir les liens économiques et stratégiques déjà tissés en éliminant les barrières tarifaires, en facilitant le commerce et l’investissement d’entreprises de toute taille et en supprimant les obstacles inutiles, tout en veillant à protéger la santé, la sécurité, les droits sociaux et l’environnement.  Nous entretenons avec La France un partenariat d’exception.  Vous êtes notre ami de la première heure.  Et aujourd’hui nous affrontons ensemble des défis considérables partout dans le monde: le combat contre Daech, les difficultés en Libye, nosefforts contre le programme nucléaire iranien, Ebola et, bien sûr, l’Ukraine.

Et sur ladeuxième question, quelles sont lesbénéfices potentiels du PTCI pour les petites et moyennes entreprises, je vous dirai  tout simplement qu’ils sont immenses.   En fait 99% des entreprises U.S. et européennes sont des PME et TPE, soit 20 millions d’entreprises en Europe et 28 millions aux Etats-Unis.  Ces PME et TPE sont source d’innovation, d’emplois et de croissance.  Mais elles ne disposent pas des moyens des grandes entreprises pour négocier les obstacles commerciaux.  Par exemple, aux Etats-Unis, 90% des entreprises exportatrices sont de petite taille, mais seul 1% d’entre elles exportent, et la plupart du temps vers un seul pays.  Nous avons donc un très faible pourcentage de PME-TPE exportatrices et elles n’ont le plus souvent qu’un seul débouché.  En même temps, les PME sont à l’origine de plus de la moitié des emplois aux Etats-Unis.  Le rôle des PME est tout aussi essentiel en Europe puisqu’elles ont créé deux tiers des emplois dans le secteur privé et qu’elles ont une extraordinaire capacité à générer de nouveaux emplois.

Ces trois millions de petites et moyennes entreprises, fabricant, producteur ou prestataire de services, en Europe et aux Etats-Unis produisent 30% des biens exportés depuis nos deux marchés.  Et n’oublions pas non plus que beaucoup de PME contribuent à la chaîne d’approvisionnement des grands groupes.  Ainsi, qu’elles exportent elles-mêmes directement, ou qu’elles participent à l’approvisionnement de plus grands exportateurs, les PME sont très bien placées pour tirer pleinement avantage de la suppression des droits de douane que le Partenariat vise à atteindre.  Sur un marché mondial aussi concurrentiel qu’aujourd’hui, même les plus petits suppléments de coût de production en raison de tarifs douaniers peuvent faire la différence entre passer ou perdre une commande pour les PME.

De plus, nos petites et moyennes entreprises des deux côtés de l’Atlantique peuvent être affectées outre-mesure par les entraves non-tarifaires.  Ces entraves peuvent être appliquées à la frontière ou « après la frontière », comme c’est le cas pour les certifications des laboratoires d’essai.  Se conformer aux exigences peut représenter un exercice difficile et coûteux, et surtout dépasser les ressources des PME.

Même lorsque les tarifs douaniers sont bas, ils peuvent devenir des obstacles dans de nombreux secteurs où les marges de profit sont faibles.  La réduction des droits de douane peut aussi permettre de réduire les coûts pour les entreprises, grandes ou petites.  Dans un marché mondial de plus en plus intégré, cela demeure l’un des objectifs critiques du PTCI.  Les entreprises siégeant en Europe doivent déjà faire face à des coûts énergétiques exorbitants et, dans certains endroits, à des coûts du travail élevés.  Leur capacité à continuer à exister dans une chaîne d’approvisionnement mondiale dépendra de leur sagacité à dénicher des biens au prix le plus bas.

De plus, le PTCI devrait être une aubaine pour les PME parce qu’elles dominent tous les secteurs dans lesquels les échanges sont sensés croître en vertu de cet accord.  Par exemple, les PME occupent près de 95% des secteurs de produits alimentaires transformés, d’équipements, d’automobiles et de pièces détachées.  Et même ces PME qui n’exportent pas vers les Etats-Unis pourront tirer bénéfice des plus grandes entreprises exportatrices.

Et la troisième question, comment pourrions-nous enlever des barrières et protéger nos citoyens en même temps?  Un objectif central du PTCI, partagé par tous, est de permettre davantage de transparence et d’ouverture, moins de coûts inutiles et de retards administratifs, et une plus grande compatibilité réglementaire, tout en maintenant des niveaux de protection de la santé, de la sécurité sanitaire et de l’environnement que chaque côté jugera approprié.  De plus, le Partenariat prévoit le développement de réglementations à venir établissant des exigences plus efficaces, économiques et compatibles, par exemple au travers d’études d’impact ou encore de mise en œuvre de bonnes pratiques réglementaires.  Des progrès dans ce domaine permettront une réglementation moins pesante pour les PME et une prise en compte de leurs besoins dans le processus réglementaire, de manière à ce qu’elles puissent réduire leurs coûts et s’ouvrir à de nouveaux marchés, des deux côtés de l’Atlantique et dans le monde entier.

Le TCI n’est pas un simple accord de libre-échange, bien que l’élimination des droits de douane soit l’un de ses buts majeurs.  C’est aussi une occasion inespérée de coordonner nos réglementations et une approche commune sur l’avenir, de manière à éviter des divergences inutiles et l’émergence de nouvelles entraves au commerce.

Des protections fortes sociales, sanitaires et environnementales sont donc essentielles.  Une des raisons d’être du PTCI est de surmonter les divergences entre des marchés bien réglementés, au profit des consommateurs et des entreprises de toute taille.  S’agissant de réglementation,des deux côtés, nous voulons des niveaux de protection de la santé, de la sécurité sanitaire et de l’environnement élevés.

Nous ne souhaitons pas réduire ces protections ou déréglementer.  Rien dans le PTCI ne va limiter la capacité de nos gouvernements à légiférer en faveur de l’intérêt public ou de réduire les normes de santé, de sécurité sanitaire, sociale et environnementale.  Aux Etats-Unis, nous accordons une même valeur que vous en Europe à des règlements adaptés.

Des détracteurs affirment que les normes américaines sont moins bonnes que les normes européennes.  Une telle généralisation est impossible étant donné qu’elles se comptent par milliers des deux côtés de l’Atlantique.  Parfois vos normes sont plus strictes, parfois ce sont les nôtres.  Les Etats-Unis et la Commission européenne pensent qu’il est inutile d’organiser un concours dans ce domaine: habituellement, nous légiférons pour parvenir aux mêmes objectifs, mais nous le faisons de façon différente.

Pour que lePTCI joue pleinement son rôle, nous devons réussir à réduire les dissonances dans nos systèmes réglementaires et normatifs.  C’est là le secteur économique le plus prometteur, surtout pour les PME qui peinent à gérer de multiples exigences réglementaires ; C’est aussi celui qui présente le plus grand défi.  Nous parviendrons peut-être  à trouver un accord là où les différences sont moindre.

Nous  parviendrons peut-être à nous accorder sur une reconnaissance mutuelle lorsque nos normes offrent le même degré de protection.  Et même lorsqu’aucune de ses deux hypothèses n’est envisageable, nous permettrons des bénéfices substantiels en éliminant les doublons dans le contrôle des produits et des installations.

En somme, nous sommes face à un choix dont les répercussions se feront sentir bien au-delà de nos frontières, et c’est un choix à la fois simple et logique: soit nous régissons la mondialisation au travers d’accords, soit nous la laissons nous régir.  Le Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement est une avancée dans la relation économique et stratégique la plus importante au monde.  Il ne s’agit pas d’une tentative de dépouillement des pouvoirs des états de protéger leurs citoyens et leur environnement.   Au contraire,je pense que c’est la plus grande chance de cette génération de renouveler nos économies et de préparer les emplois de demain.

Merci.