
Aviateur et musicien, né à Columbus (Géorgie), mort à New York City (New York)
Enfant d’esclaves, Eugene James Bullard quitte les États-Unis en 1912 après nombre de tribulations et débarque à Paris en 1913 pour y disputer un match de boxe, à l’Élysée Montmartre. Il décide de rester à Paris définitivement. Lorsque débute la Première Guerre mondiale, il s’engage dans la Légion étrangère en se vieillissant d’un an. Il participe aux combats dans la Somme et est blessé à Verdun. Il se voit décerner la Croix de Guerre et est déclaré inapte pour l’infanterie, mais, désireux de continuer à se battre, obtient d’être nommé élève-pilote, et devient ainsi le premier pilote noir au monde. En 1916, il rejoint le Lafayette Flying Corps. Mais, suite à l’entrée en guerre des États-Unis en 1917, il est rétrogradé au 170e régiment d’Infanterie. Démobilisé, il devient batteur de jazz dans des nightclubs de Pigalle, est embauché comme serveur puis directeur artistique au cabaret Zelli’s, à Montmartre, puis reprend le cabaret Le Grand Duc, 52 rue Pigalle (9e), dont les vedettes sont les chanteuses Florence Embry Jones puis Ada « Brickop » Smith. Le succès de ce cabaret, fréquenté par Chaplin, Picasso, Mistinguett, Fitzgerald, Hemingway, Man Ray, fait de lui l’une des figures majeures du jazz et des nuits parisiennes de la « Génération Perdue ». Au début des années trente, il revend le Grand Duc pour ouvrir un bar, L’Escadrille, au 15 rue Fontaine (9e). Il ouvre également un gymnase, 15 rue Mansart (9e) : il y accueille, entre autres, Louis Armstrong, qui habite pendant un an au 34 de la rue de la Tour d’Auvergne (9e). Au début de la Seconde Guerre mondiale, Bullard, qui parle allemand, est recruté par le contre-espionnage pour surveiller les agents allemands fréquentant son bar parisien. Le 15 juin 1940, incorporé comme mitrailleur dans le 51e régiment d’infanterie à Orléans, il est blessé en participant aux combats pour défendre la ville. En juillet 1940, il est évacué aux États-Unis. Il devient alors garçon d’ascenseur au Rockefeller Center. De retour à Paris en 1954, invité par le gouvernement français pour ranimer, avec deux Français, la flamme de la tombe du soldat inconnu sous l’Arc de triomphe, place de l’Étoile, pour des commémorations, il déclare : « La France m’a donné la vraie signification de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Je ne pourrais jamais lui rembourser tout ce que je lui dois. » En 1959, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur par le Général de Gaulle qui le qualifie de « véritable héros français » : il reçoit sa quinzième médaille des mains du Consul français à New York. Il meurt en 1961 et il est enterré dans son uniforme de légionnaire, avec tous les honneurs militaires, par des officiers français dans la section des vétérans de la guerre française du cimetière de Flushing, dans le Queens à New York.